Chez la dermatologue : 

«Personne suivante?» C’est à mon tour, je me lève de ma chaise et suis la dermatologue vers son cabinet. Deux fauteuils Wassily noirs sont placés en face du bureau du praticien. Je vais enfin pouvoir essayer ces objets iconiques dont j’ai tant entendu parler! Je tourne autour en laissant ma main glisser sur le tube en acier froid du dossier. Je ressens via les courbes de l’ossature, le guidon de vélo qui aurait inspiré Marcel Breuer. Magnifique ! Mon regard est absorbé par ces légendes, si bien que je n’écoute que d’une oreille ce que me dit la spécialiste. Sept sangles en cuir noir tendues, c’est la peau de ce Wassily qui semble prête à me recevoir. « Oups ! » Je viens de glisser au fond du fauteuil en un rien de temps, entrainant la chute de mon téléphone placé dans ma poche. Je les vide pour éviter que tout ne tombe mais l’autre fauteuil ne permet pas que je pose mes éléments personnels dessus. Un peu gêné j’abandonne le tout sur le bord du bureau en face de moi. Il est si haut que je dois me pencher en avant et me positionner sur la première moitié de l’assise pour l’atteindre. Le dos bien droit, je continue la discussion avec mon interlocutrice. Cependant, j’ai bien envie de profiter pleinement de l’expérience qu’offre ce fauteuil. Je me laisse glisser au fond une deuxième fois. Je me retrouve dans une position de lecture non propice au dialogue. J’ai l’impression de manquer de respect. Suis-je trop bas ou bien le bureau est-il trop haut? Je ne le sais pas. Je ne suis pas à l’aise pour parler, je m’avance à nouveau. Je me retrouve à la même hauteur que mon médecin. Je ne ressens plus cette infériorité au prix d’une mauvaise assise. Est-ce que je suis bien assis finalement dans ce fauteuil ou bien l’environnement fait-il que je m’y sente mal à l’aise dedans ? Je n’ai pas la réponse et je passe dans la pièce d’à côté pour l’examen. 

Photographies : © Cécile Braneyre

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