Design Luminy 586802127.324658-242x300 Sur Mallet-Stevens – Marie Dormoy - L'amour de l'art, 1927 Histoire du design Références Textes  Villa Noailles Robert Mallet-Stevens pavillon du tourisme Marie Dormoy Garage Alfa-Romeo Design Marseille Enseignement Luminy Master Licence DNAP+Design DNA+Design DNSEP+Design Beaux-arts
Pavillon du tourisme, 1925

Qui veut connaître Mallet-Stevens et comprendre son art, doit l’observer sous toutes les faces de son talent, sous les multiples aspects de sa production. II faut entendre par lä qu’il faut l’étudier, non seulement comme architecte, mais aussi comme décorateur d’intérieurs, et comme décorateur de cinéma.

Comme tous les esprits libres et féconds, il fit des études assez fantaisistes. Élève de l’école centrale d’architecture — cette sœur aînée de l’École des Beaux-Arts — il chercha lui-même sa voie, et, soit attirance particulière, soit hasard, étudia surtout et s’occupa de l’architecture japonaise. Cet art sobre, presque schématique, était fait pour seduire Mallet-Stevens. Comprenant la leçon de l’orient, il se servit, comme eux, de la ligne droite, et c’est son emploi presque exclusif qui a donné à sa production un caractère si personnel.
Bien qu’architecte, Mallet-Stevens s’inquiète assez peu du matériel employé. II se sert du béton armé parce qu’en ce moment il est le plus economique, le plus pratique, celui qui permet des portees inconnues jusqu’ici, celui qui se plie ä des réalisations inconcevables il y a seulement cinquante ans. Mais Mallet-Stevens ne « pense » pas en béton arme. II pense en homme raffine, soucieux au plus haut point de confort et de bien-être, et de repos, et ensuite il pense en plasticien.
C’est l’homme qui établit le plan, qui limite l’espace d’une pièce, qui mesure la hauteur et la pente d’un escalier, qui distribue la maison de façon ä ce que l’on ait le moins de pas à faire, le moins d’efforts à fournir, à ce que tout soit à portée de la main, et cela parce que la maison doit être avant tout le lieu du repos, du délassement, parce que nous autres, pauvres gens lancés dans la vie moderne, nous devons fournir un effort et supporter une existence si mouvementee, si bruyante, si trépidante, que nous devons, dans notre home, vivre aussi quietement que possible.

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Projet d’Aéro-club

C’est le plasticien qui donne l’aspect extérieur, qui équilibre les volumes, qui alterne les ombres et les lumières. C’est ce qui explique, dans l’œuvre de Mallet-Stevens, bien des détails de construction qui ne sont pas nécessaires à la structure même de l’édifice. Du reste, Mallet-Stevens lui-même affirme qu’il ne peut traiter l’architecture que comme une sculpture. En ce temps où les mots de construction, constructif, sont employés pour tout et partout, sa déclaration est d’une belle hardiesse. Pour affirmer jusqu’au bout sa conception, Mallet-Stevens dissimule même le matériel employé sous un enduit. II se sert du béton comme d’un précieux serviteur qui sait se plier à toutes les fantaisies de son maitre, mais il ne le laisse pas apparaître. Jamais, dans ses façades, on ne soupçonne l’emplacement des poteaux de structure. II les fait disparaître pour obtenir ces grandes surfaces planes sur lesquelles la lumière se reflète librement, et qui font d’autant plus valoir les ombres.
Mais les maisons édifiées par Mallet-Stevens auraient, je crois, le même aspect, la même plastique, si les poteaux de béton étaient remplaces par des poteaux de fer, ou de tout autre matériel connu ou à venir.
Mallet-Stevens se manifesta pour la première fois au Salon d’Automne de 1912. Les quelques visiteurs qui s’égarèrent, pour d’autres raisons que sentimentales, dans la section d’architecture, furent stupéfaits de voir une vingtaine de projets signes du même nom : projets d’architecture, d’urbanisme, de jardins, de meubles, etc. … Deux des projets d’avant-guerre devaient se réaliser, la maison de Mme Paquin, et celle du musicographe bien connu, M. Ecrocheville. La guerre a malheureusement fait avorter ses projets, et Mallet-Stevens dut attendre bien longtemps après l’armistice pour pouvoir enfin s’exprimer.
Malgré la lourde tâche que lui donnait sa Charge de professeur ä l’École Centrale d’architecture, Mallet-Stevens construisit des villas ä Auteuil, Boulogne, Ville-d’Avray, reconnaissables entre toutes par leurs grands murs droits sans couronnements, sans corniches, coupes par de longues fenêtres, tenant parfois toute la largeur d’une pièce.
On emploie beaucoup, dans l’architecture moderne, des fenêtres basses et longues. N’est-ce pas une réaction, trop voulue, contre la fenêtre ordinaire, carrée ou rectangulaire ?
La fenêtre large et basse était la fenêtre médiévale. On la trouve dans tous les documents de l’époque, soutenue par de nombreux meneaux. Elle avait alors sa raison d’être : meilleure défense contre le froid, puisque tout le bas de la pièce était protégé par un mur plein empêchant les courants d’air inférieurs, économie de surface vitrée, puisque la lumière arrivait juste ä la hauteur des mains et des visages, c’est-ä-dire où elle était strictement nécessaire.
Mais maintenant que de puissants radiateurs surchauffent les appartements, que la lumière peut nous venir de partout, pourquoi revenirà ces fenêtres longues qui attristent une pièce en empêchant le soleil d’y entrer aussi largement que lorsque la fenêtre est carrée ou descend jusqu’au sol, et qui ne permettent pas l’évacuation des gaz lourds. Mallet-Stevens sacrifie aussi, malheureusement, à la mode des fenêtres d’angles, qui ne sont nullement indispensables pour l’intérieur, et qui, à l’extérieur, brisent si fâcheusement l’arête des angles.

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Pavillon du Tourisme, perspective, Paris, 1925

Dans les constructions de Mallet-Stevens, une place de choix doit être réservée au charmant pavillon du Tourisme, et à celui des Transports parisiens, élevés à l’Exposition de 1925. Le pavillon du Tourisme, de belles proportions avec sa tour (le mot est bien impropre), formée de quatre pans de béton se coupant à angles droits, le haut amplifié par une horloge, encore elargie par des abats-sons, amusant par sa couleur rouge et blanche, fut un des mieux réussis. Ces abats-sons, au-dessus de la porte, étaient repris comme éléments décoratifs, ou plutôt plastiques. L’intérieur du pavillon, très sobre, avec sa frise de vitraux incolores, était d’une reelle beauté. II est dommage qu’on ne l’ait pas conservé. Au garage Alfa-Romeo, Mallet-Slevens a cherché des jeux d’ombre et de lumière, une grande élégance dans une grande simplicité. Le centre du terrain était pris par une cour qu’il fallait conserver à tout prix, ä cause des immeubles voisins. Afin de consolider les bâtiments déjà existants, Mallet-Stevens a lancé, sur chaque façade inférieure longitudinale de la cour, un arc parabolique, auquel il a accroché la construction. Ce sont les trois cotes de cette cour qui ont été aménagées en garage.
La façade a été recouverte d’un revêtement blanc. Les fenêtres ont été élargies, de façon à n’en former qu’une grande, divisée par deux meneaux. De chaque côte de cette large fenêtre, deux parois verticales, non nécessaires à la construction, mais destinées uniquement à produire un effet de relief, supportent des lettres rouges indiquant la destination de l’édifice.

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Garage Alfa-Romeo, Hall, 1927

Le rez-de-chaussée est occupé par une salle d’exposition, avec un amusant décor géométrique — le régulier dans l’irrégulier — rouge, rose, noir, blanc, gris. L’éclairage invisible est tamisé par des vitraux de Barillet. Au-dessus, comme une frise courante, le titre de la firme. Les deux portes latérales, donnant accès au garage, sont indiquées par deux lanternes englobées dans des motifs carrés, placés les uns au-dessus des autres, avec espacements réguliers. Dans la décoration pour cinéma, Mallet-Stevens a donné libre cours à sa fantaisie. Personne n’a oublié les beaux décors presque fantastiques de l’Inhumaine, non plus que ceux de Vertige.

 

 

 

Source : Marie Dormoy, Robert Mallet-Stevens, l’Amour de l’Art, (1927).

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