Avant le geste, il y a l’intention : je ne conçois pas, mais je projette. Je dessine beaucoup en procédant par association de tons et recherche de combinaisons. Puis je tente une forme, je tords l’objet, le suspends la tête en bas, je lui ôte un bras et pourquoi pas deux si ça tient ? Je le dissèque. Un l de coton à broder, un deuxième, un troisième, un quatrième… hop je m’arrête à 5 ! On me demande d’assembler deux matières, ce sera coton et papier. Papier épais, lourd, rigide. Surtout pas de tissu et le fil de coton comme feutre. La mise en plis du papier permet d’assembler les motifs que je décontracte en forme d’escalier. Le motif de la cellule est dupliqué, multiplié.
Le module naît, je l’accouche.
Partie d’un principe de travail que j’ai volontairement établi comme étant relativement contraint, les motifs changent, la technique et les couleurs restent les mêmes, formant ainsi le liant et le point de repère qui rassemblent les essais graphiques. La série se constitue, la cohérence la suture.
À la fin de l’opération, j’arrive au cœur, je l’isole. Si je le reproduis, il me permet de fabriquer des objets modulaires aisément transportables. Le design est une construction, une adaptation permanente des moyens aux contingences à la manière de Maître Hsin-Fu Hung, artisan taïwanais en art du pop-up qui, n’ayant pas assez d’argent pour apporter de la nourriture lorsqu’il était invité chez des amis, offrait des poissons de papier peu digestes, mais bien plus pérennes !
Mes déménagements fréquents étant jeune, ont créé une sensation de perte :
je devais à chaque fois laisser des choses derrière moi alors que je désirais tout conserver. Ces changements d’habitat ont développé le goût pour les objets facilement démontables avec peu ou pas d’éléments de fixation tout en étant solides et de bonne facture. Ainsi le mobilier de la tente de Napoléon présenté aux Invalides m’inspire. De l’encrier au lit, tout est démontable ou pliable, léger, conçu pour s’adapter aux voyages fréquents. Sur le plan créatif, l’omniprésence du blanc monochrome de l’hôpital réveille en moi le besoin de couleurs. Aussi le mobilier repositionnable propre aux structures de soin imprègne mon travail. Il facilite le déplacement des meubles et le changement rapide de l’agencement des lieux.
L’enseignement que j’ai suivi m’a apporté une base de connaissances sur une forme d’art plus libre, car moins dictée par l’usage, qui me permet de me détacher de certains codes propres à la conception d’objets. En souhaitant compléter mon apprentissagepar le design d’espace, je poursuis l’idée de ma démarche qui allie l’objet à son usage, en résonance avec son gîte, que ce soit par la conception de familles d’objets ou par
un travail graphique pourvoyeur d’identité.
Jury Dnap 2017
Présidente : Aurelie Mathigot, Artiste
Norbert Truxa : Designer, Chercheur
Axel Schindlbeck : Designer, représentant l’Esadmm