Design Luminy larchitecturedaujourdhui-n7-octobre1933-ma-fr-0001-510x677-226x300 Robert Mallet-Stevens – L'Union des Artistes Modernes Histoire du design Références Textes  UAM Robert Mallet-Stevens Pierre Chareau Eileen Gray Design Marseille Enseignement Luminy Master Licence DNAP+Design DNA+Design DNSEP+Design Beaux-arts
L’architecture d’aujourd’hui – n°7 – octobre1933

Lorsqu’il y a peu d’années fut créée l’Union des Artistes Modernes, quelque mauvaise humeur se manifesta dans le public, dans le public s’intéressant aux questions d’art et parmi certains milieux d’artistes. « Encore un groupement ! Et quel groupement ! Des fauves, des excentriques, des illuminés, etc. » Et certains critiques d’art attaquèrent avec cette audace qu’autorise la certitude de pouvoir être sévère pour des artistes, sans aucune crainte : faire du tort à un artiste qu’on n’aime pas ou qu’on ne comprend pas est moins dangereux que de s’attaquer à un produit commercial ! « Tel chocolat est immangeable ! » « Telle voiture ne tient pas la route ! » Ça, on n’oserait pas le dire, le chocolat ou la voiture ont moins bon caractère que l’artiste ! Donc, dés sa création, l’UAM connut une haine farouche : revues, conférences s’élevèrent contre l’art moderne avec une véhémence étonnante. Car le crime consistait à vouloir être de son époque ! L’UAM était « pour » quelque chose et non « contre » quelqu’un. Son but est de créer et non de critiquer. Construire et non flétrir. Pourtant, combien elle eut d’ennemis ! Jamais l’UAM n’a attaqué un homme, une personnalité. Elle aurait pu blâmer bien des choses, elle s’est abstenue ; la laideur des timbres-poste, des billets de banque, des boîtes de cigarettes, l’embouteillage des fortifications démolies par des immeubles coagulés, la saleté des marchés en plein air, la stupidité de certains monuments, la laideur de bien des statues édifiées sur nos places publiques, toutes ces offenses aux hommes contemporains l’ont scandalisée, mais elle n’a point réagi. Je le répète, sa ligne de conduite n’est pas de porter des jugements ou d’exprimer des regrets, c’est de composer, de créer.

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Pavillon de l’UAM (Georges-Henri Pingusson, en collaboration avec F .-Ph. Jourdain et A .-L . Louis) – Exposition internationale des arts et techniques, Paris, 1937

L’UAM est faite d’artistes et c’est par la réalisation que la masse est frappée. Une bicoque bien conçue peut créer plus de sympathisants qu’une campagne de presse, nous en avons des preuves. Les expositions de l’UAM, au pavillon de Marsan, à la galerie Georges Petit, à la galerie de la Renaissance, eurent un énorme succès, malgré de très faibles moyens ! L’UAM allait de l’avant non pour « épater », mais pour être de son temps. Les problèmes économiques, sociaux, ne la laissèrent pas indifférente : une maison, une chaise, une sculpture « doivent » aujourd’hui être différentes de ce qu’elles étaient hier_ L’UAM, enfin, « marchant » toujours tout droit, remporta une énorme victoire. Il suffit de feuilleter les revues d’art vieilles de quelques années. Sur une page, les « fous » de l’UAM, sur cent pages, les « autres ». Et maintenant ? La plupart des « autres », les ennemis d’hier, font figure de bons élèves. Ils ont crié, mais ils ont suivi. Peut-on nier l’influence d’un Le Corbusier en architecture, d’un Cassandre en affiches, d’un Legrain en reliures, d’un Chareau en ameublement, d’un Barillet en vitraux, d’une Hélène Henry en tissus, d’un Francis Jourdain en décoration, d’un Puiforcat en orfèvrerie ? Et l’UAM est composée de soixante membres, tous animés d’un même idéal. Tous créateurs, chercheurs unis, une équipe de jeunes, sinon par l’âge, du moins par la pensée. Et vint 1937. L’exposition et la Direction générale des beaux-arts offrirent à UAM un magnifique terrain et des crédits autorisant une manifestation intéressante. Le public jugera l’effort de l’UAM. Son pavillon, sa construction, son installation, les œuvres exposées, toutes personnelles, ont l’unité que procure une même pensée. L’UAM, qu’on a voulu étouffer, est bien vivante. 

Robert Mallet-Stevens, L’Architecture d’aujourd’hui, n° 7, 1937

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