« AAARGH ! » CRI DE SURPRISE, DE PEUR ET D’ANGOISSE ! INQUIÉTUDE REFOULÉE QUI NE DEMANDE QU’À S’ÉCHAPPER, MAIS NE PARVIENT PAS À S’EXPRIMER. C’EST LA COLÈRE INTÉRIEURE GARDÉE CONTRE NOUS — MÊMES OU CONTRE LES AUTRES. CET « AUTRE » S’OPPOSE À NOUS, MAIS NOUS SOUHAITONS VRAIMENT COMMUNIQUER AVEC LUI, BIEN QU’IL SOIT BIZARRE, DIFFÉRENT, INCOMPRÉHENSIBLE, BIEN QU’IL AIT
L’AIR D’UN MONSTRE À NOS YEUX. AAARGH ! JE TROUVE QUE CE SON, CE CRI, EST UN VRAI LANGAGE PRIMITIF. UN LANGAGE PORTÉ PAR CES NOUVEAUX MONSTRES QU’IL FAUT COMPRENDRE ET DÉCRYPTER.
LE MONDE DES MONSTRES EST COMME CELUI DES HOMMES : IL Y A DE L’AMOUR, IL Y A DE LA HAINE, IL Y A TOUT ! L’HUMAIN, PETIT À PETIT, SE MUTE ET DEVIENT MONSTRE, LE CORPS DEVIENT HYBRIDE.
La place du corps humain est très importante dans mes inspirations ; je suis fasciné par le corps et ses manipulations, j’en fais une sorte de fétiche moderne. Mes inspirations proviennent de l’exploration de la génétique, de la biologie, du transhumanisme ou de l’hybridité. J’ai aussi une obsession naturelle pour les formes organiques telles que la mousse, les taches, les bosses, l’épine dorsale, les fluides visqueux. Je réfléchis aux tensions, aux frontières qui s’exercent entre peau et matière, entre vivant et inanimé, entre organique et technologique, à les faire fusionner comme si c’était une seule et même entité. Une essence ou les objets font corps avec la chair et l’équilibre humain, donnant naissance à un nouvel organisme autonome. J’essaie de créer une illusion et de jouer avec les limites du corps. J’explore les volumes et le remodelage de la silhouette humaine de façon rapide afin d’expulser toute l’énergie créatrice, tant par un aspect visuel, que par les sens. Que ce soit par le son émis par le corps en mouvement, par ce que ressent l’homme dans sa nouvelle peau, par son déplacement, je veux remettre en question notre identité corporelle et psychologique à travers un vêtement qui habite le corps : mi-homme mi-bête, des êtres extrahumains, des mutants prêts pour affronter l’asphalte et nos jungles cosmopolites. J’essaie de mener mon travail à mi-chemin entre art et mode, de mêler design, architecture, nouvelles technologies et critique sociale. Mes thèmes de prédilection sont l’identité, l’isolement, l’oppression et le mouvement du corps. Je suis intéressé par la mode, mais pas au sens général du terme, je me préoccupe plus de l’évolution du corps humain et de son enveloppe à travers le vêtement. Les formes et secondes peaux que je produis complètent et transforment le corps, et donc les émotions. C’est la quête de la perfection du corps qui m’interpelle sur nos idéaux de la beauté. L’hybridation remet en question notre identité corporelle et psychologique. J’utilise les codes esthétiques pour défier les valeurs du beau et du bon goût : difformité, exagération, accumulation, expansion pour provoquer et faire réagir sur notre identité. Attirance, répulsion, malaise, peur, angoisse : utiliser le corps pour y exprimer ses émotions et le métamorphoser. Recomposés, ces éléments transforment le corps et ses manipulations pour créer un être hybride et nous interroger sur notre identité. Cette transformation identitaire crée alors la surprise. L’objet incorporé devient une partie indissociable du corps et métamorphose l’homme en créature monstrueuse. Les concepts de beauté et de laideur se rejoignent pour créer une beauté qui s’épanouit hors des canons de l’esthétique.
Jury Dnsep 2018 :
Présidente : Esjieun Kim, Architecte, Artiste
Mémoires : Véronique Verstraete, Artiste
Kader Mokaddem : Philosophe
Fred Terry : Designer
Frédérick du Chayla : Designer, représentant l’Esadmm